L'actualité
met en lumière la nécessaire coopération....déjà bien installée dans
les mécaniques de jeu !
Je restitue ici l'interview de Matt Leacock à
propos de son jeu coopératif ...Pandémie, un classqiue qu'on ne
présente plus mais qui explicite de façon tellement réaliste la
propagation d'un virus...C'est grâce à la traduction ( publiée ici avec
leur aimable autorisation) de l'équipe suisse de Gus and Co qu'elle nous est donnée à lire en français :
Aucun joueur ne peut gagner à ce jeu de société tout seul. Il s’appelle Pandemic
Temps de lecture: 4 minutes
Matt Leacock, The New York Times, mardi 25 mars 2020
J’ai créé un jeu coopératif pour encourager les gens à jouer ensemble. Covid-19 le rend plus pertinent que jamais.
Notre nouvelle réalité est devenue très immédiate pour ma femme Donna et moi à la fin de février, lorsqu’elle est arrivée avec de mauvais symptômes qui ressemblait à la grippe et n’a pas pu se faire tester pour le coronavirus avant quatre longues semaines. Quand elle l’a finalement fait, nous avons été soulagés quand le test est revenu négatif.
Mais cela me touchait personnellement à plus d’un titre : Donna a été l’inspiration pour Pandemic, un jeu de société sorti à l’origine en 2008. Je l’ai conçu pour jouer avec elle.
Au début de notre mariage, nous avons joué à toutes sortes de jeux ensemble. Certains ont bien marché pour nous, tandis que d’autres… pas. Je me souviens d’un jeu de négociation particulièrement désastreux où les émotions générées par ma manipulation psychologique, la compétition acharnée et les trahisons pendant le jeu se sont instillés dans le monde réel et ont mis notre relation à rude épreuve.
En jouant ensemble à notre premier jeu coopératif, nous avons vécu une expérience très différente. Les défis étaient d’autant plus excitants à partager. Et que nous ayons gagné ou perdu, nous avions tous les deux apprécié le voyage parce que nous y participions ensemble.
Dans cet esprit, j’ai commencé à concevoir mon premier jeu coopératif en 2004. L’épidémie de SRAS avait récemment éclaté et j’imaginais que les virus représenteraient les antagonistes parfaits pour les joueurs. Les virus sont indifférents, implacables et effrayants.
Je me suis mis à créer un modèle simple de leur comportement à l’aide d’un plateau, d’un jeu de cartes et de cubes en bois.
Le résultat a été Pandemic. Dans le jeu, tous les joueurs travaillent ensemble pour tenter de sauver l’humanité de quatre maladies mortelles. Tout le monde se déplace à tour de rôle dans le monde entier, traitant les populations infectées pour faire face aux menaces à court terme, dans le but de gagner suffisamment de temps pour atteindre votre objectif à long terme : la découverte des remèdes nécessaires.
Chaque joueur adopte un rôle différent, avec des compétences uniques. Vous pouvez incarner un médecin qualifié dans le traitement des infections, un chercheur globe-trotteur qui peut partager les connaissances essentielles nécessaires pour développer des traitements, ou même quelqu’un qui peut aider les autres experts à se déplacer entre les villes.
Les joueurs doivent communiquer leurs idées de manière claire et efficace afin qu’elles soient comprises, reconnues et discutées si nécessaire. Ils doivent coordonner leurs plans pour être le plus efficace possible pour ralentir la propagation de la maladie. Plus que tout, ils doivent coopérer : il n’y a aucun moyen qu’un seul joueur puisse gagner le jeu par lui-même.
Lorsque Pandemic est sorti sur le marché, les jeux coopératifs étaient rares. Alors qu’ils gagnent aujourd’hui en popularité, je me demande pourquoi il leur a fallu si longtemps pour se faire accepter. Je me suis également demandé pourquoi, jusqu’à récemment, nous considérions les jeux et la compétition comme étant des synonymes.
Compte tenu des conditions dans lesquelles nous nous trouvons maintenant, il n’est pas surprenant qu’un jeu appelé Pandemic soit populaire. J’ai vu des publications sur les réseaux sociaux où les gens craignent qu’y jouer ou regarder un film catastrophe comme « Contagion » soit morbide et peut-être socialement inacceptable. Pour moi, une telle activité est un moyen naturel de faire face à notre nouvelle réalité. Cela donne aux gens une chance de confronter leurs peurs, de donner un sens à la situation et peut-être même de se sentir un peu en contrôle alors qu’ils tentent de défier eux-mêmes les grands méchants.
Mais je ne peux pas me débarrasser de ce vil sentiment de me dire que le jeu connaît un plus grand succès quand il ressemble aux événements actuels, lorsque de vraies personnes souffrent.
J’espère que Pandemic puisse nous fournir un modèle en cette période de crise. Nous ne devons pas tous être des héros globe-trotteurs pour participer. Nous avons chacun des compétences spéciales et nous devons les utiliser pour rendre le confinement plus sûr et plus facile à supporter. Nous devons communiquer efficacement, tendre la main à nos amis et à nos proches, et veiller à ce que tout ce que nous partageons sur les réseaux sociaux soit basé sur des faits.
Nous devons coopérer, prendre soin de nos voisins plus âgés et trouver des moyens de travailler à domicile dans la mesure du possible. Et nous devons coordonner et partager des idées pour divertir les enfants, pour aider les autres à obtenir des fournitures difficiles à obtenir et pour soutenir les agents de santé en première ligne. Cela va prendre des mesures collectives sérieuses et des sacrifices pour ralentir la propagation du virus. Il est réconfortant de voir des organisations, des particuliers et certains chefs de gouvernement se mobiliser.
Pourtant, il est clair que, comme le jeu désastreux auquel j’ai joué au début de mon mariage avec Donna, nous ne travaillons pas tous ensemble. L’achat massif (=hoarding) et la hausse des prix n’ont pas leur place dans une crise. Pas plus que les stratégies du « eux-contre-nous » utilisées par certains de nos dirigeants, accusant d’autres pays et partis politiques ou dénaturant les dangers de la maladie.
Les jeux de société ont des enjeux relativement faibles, mais j’ai appris qu’ils ont beaucoup à nous apprendre : nous devons tous jouer avec nos forces, équilibrer les menaces à court terme et les objectifs à long terme et faire des sacrifices pour le bien commun. Si nous pouvons communiquer, coordonner et coopérer efficacement, nous pourrions mieux surmonter cet adversaire indifférent, implacable et effrayant.
L’auteur du fameux jeu de société coopératif Pandemic, Matt Leacock, parle de son jeu dans le New York Times
C’est dans le très célèbre journal américain The New York Times que l’auteur de jeux de société Matt Leacock s’est fendu hier mardi 25 mars 2020 d’un riche article dans lequel il revient sur son jeu, Pandemic. Et en quoi ce jeu est devenu extrêmement pertinent aujourd’hui, en pleine pandémie mondiale réelle. Nous vous proposons ici la traduction de l’article, nous pensons qu’il peut vous intéresserMatt Leacock, The New York Times, mardi 25 mars 2020
J’ai créé un jeu coopératif pour encourager les gens à jouer ensemble. Covid-19 le rend plus pertinent que jamais.
Notre nouvelle réalité est devenue très immédiate pour ma femme Donna et moi à la fin de février, lorsqu’elle est arrivée avec de mauvais symptômes qui ressemblait à la grippe et n’a pas pu se faire tester pour le coronavirus avant quatre longues semaines. Quand elle l’a finalement fait, nous avons été soulagés quand le test est revenu négatif.
Mais cela me touchait personnellement à plus d’un titre : Donna a été l’inspiration pour Pandemic, un jeu de société sorti à l’origine en 2008. Je l’ai conçu pour jouer avec elle.
Au début de notre mariage, nous avons joué à toutes sortes de jeux ensemble. Certains ont bien marché pour nous, tandis que d’autres… pas. Je me souviens d’un jeu de négociation particulièrement désastreux où les émotions générées par ma manipulation psychologique, la compétition acharnée et les trahisons pendant le jeu se sont instillés dans le monde réel et ont mis notre relation à rude épreuve.
En jouant ensemble à notre premier jeu coopératif, nous avons vécu une expérience très différente. Les défis étaient d’autant plus excitants à partager. Et que nous ayons gagné ou perdu, nous avions tous les deux apprécié le voyage parce que nous y participions ensemble.
Dans cet esprit, j’ai commencé à concevoir mon premier jeu coopératif en 2004. L’épidémie de SRAS avait récemment éclaté et j’imaginais que les virus représenteraient les antagonistes parfaits pour les joueurs. Les virus sont indifférents, implacables et effrayants.
Je me suis mis à créer un modèle simple de leur comportement à l’aide d’un plateau, d’un jeu de cartes et de cubes en bois.
Le résultat a été Pandemic. Dans le jeu, tous les joueurs travaillent ensemble pour tenter de sauver l’humanité de quatre maladies mortelles. Tout le monde se déplace à tour de rôle dans le monde entier, traitant les populations infectées pour faire face aux menaces à court terme, dans le but de gagner suffisamment de temps pour atteindre votre objectif à long terme : la découverte des remèdes nécessaires.
Chaque joueur adopte un rôle différent, avec des compétences uniques. Vous pouvez incarner un médecin qualifié dans le traitement des infections, un chercheur globe-trotteur qui peut partager les connaissances essentielles nécessaires pour développer des traitements, ou même quelqu’un qui peut aider les autres experts à se déplacer entre les villes.
Les joueurs doivent communiquer leurs idées de manière claire et efficace afin qu’elles soient comprises, reconnues et discutées si nécessaire. Ils doivent coordonner leurs plans pour être le plus efficace possible pour ralentir la propagation de la maladie. Plus que tout, ils doivent coopérer : il n’y a aucun moyen qu’un seul joueur puisse gagner le jeu par lui-même.
Lorsque Pandemic est sorti sur le marché, les jeux coopératifs étaient rares. Alors qu’ils gagnent aujourd’hui en popularité, je me demande pourquoi il leur a fallu si longtemps pour se faire accepter. Je me suis également demandé pourquoi, jusqu’à récemment, nous considérions les jeux et la compétition comme étant des synonymes.
Compte tenu des conditions dans lesquelles nous nous trouvons maintenant, il n’est pas surprenant qu’un jeu appelé Pandemic soit populaire. J’ai vu des publications sur les réseaux sociaux où les gens craignent qu’y jouer ou regarder un film catastrophe comme « Contagion » soit morbide et peut-être socialement inacceptable. Pour moi, une telle activité est un moyen naturel de faire face à notre nouvelle réalité. Cela donne aux gens une chance de confronter leurs peurs, de donner un sens à la situation et peut-être même de se sentir un peu en contrôle alors qu’ils tentent de défier eux-mêmes les grands méchants.
Mais je ne peux pas me débarrasser de ce vil sentiment de me dire que le jeu connaît un plus grand succès quand il ressemble aux événements actuels, lorsque de vraies personnes souffrent.
J’espère que Pandemic puisse nous fournir un modèle en cette période de crise. Nous ne devons pas tous être des héros globe-trotteurs pour participer. Nous avons chacun des compétences spéciales et nous devons les utiliser pour rendre le confinement plus sûr et plus facile à supporter. Nous devons communiquer efficacement, tendre la main à nos amis et à nos proches, et veiller à ce que tout ce que nous partageons sur les réseaux sociaux soit basé sur des faits.
Nous devons coopérer, prendre soin de nos voisins plus âgés et trouver des moyens de travailler à domicile dans la mesure du possible. Et nous devons coordonner et partager des idées pour divertir les enfants, pour aider les autres à obtenir des fournitures difficiles à obtenir et pour soutenir les agents de santé en première ligne. Cela va prendre des mesures collectives sérieuses et des sacrifices pour ralentir la propagation du virus. Il est réconfortant de voir des organisations, des particuliers et certains chefs de gouvernement se mobiliser.
Pourtant, il est clair que, comme le jeu désastreux auquel j’ai joué au début de mon mariage avec Donna, nous ne travaillons pas tous ensemble. L’achat massif (=hoarding) et la hausse des prix n’ont pas leur place dans une crise. Pas plus que les stratégies du « eux-contre-nous » utilisées par certains de nos dirigeants, accusant d’autres pays et partis politiques ou dénaturant les dangers de la maladie.
Les jeux de société ont des enjeux relativement faibles, mais j’ai appris qu’ils ont beaucoup à nous apprendre : nous devons tous jouer avec nos forces, équilibrer les menaces à court terme et les objectifs à long terme et faire des sacrifices pour le bien commun. Si nous pouvons communiquer, coordonner et coopérer efficacement, nous pourrions mieux surmonter cet adversaire indifférent, implacable et effrayant.
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